PARADISE – film iranien 2015

PARADISE de Sina Ataeian Dena, 2015

Paradise a été réalise sans autorisation ni subvention. C’est un film sur la violence que subissent les femmes, mais pas celle que l’on entend communément par l’acte de violence mais la violence institutionnalisée. Il n’y a pas d’agressivité et la violence envers les femmes ne s’incarne pas dans la figure d’un homme,  c’est une chape de plomb sur les femmes.

Tous les matins, les petites filles doivent chanter une prière et faire des exercices physiques dont les consignes sont diffusée par haut parleur

Tous les matins, les petites filles doivent chanter une prière et faire des exercices physiques dont les consignes sont diffusée par haut parleur

Hanieh, 25ans, est institutrice. Tous les jours elle se rend dans une banlieue très éloignée pour enseigner. Elle doit prendre le taxi, le métro, le bus, marcher, tous les matins, tous les soirs. Ca la fatigue mais sa demande de mutation est bloquée dans le labyrinthe de l’administration. Tous les matins, avant d’aller travailler elle doit s’habiller de façon à couvrir tout son corps, dans des vêtements amples et foncer et revêtir la robe islamique d’Iran. Elle doit respecter les règles strictes de l’école où elle enseigne. Autour d’elle, les autres institutrices suivent les mêmes règles. Les petites filles portent un uniforme et un voile. A sa pause, Hanieh se cache pour fumer.

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Les autres jours, elle porte un foulard coloré, des jeans et passe du temps sur son téléphone. Elle rit sur un banc avec sa soeur en se racontant des histoires. Personne ne sait qu’elle a le crâne rasé sous son voile. Elle écoute la radio et entend les forces de police chercher deux petites filles de son école qui ont disparues alors qu’elles rentraient chez elles.

Dans ce film on ne voit que très peu d’hommes. A l’école il n’y a que le concierge qui distribue les goûters et ramasse les ballons que l’on aperçoit de temps en temps. Dans les administrations, pour sa demande de transfert, Hanieh ne voit que des femmes. Les seuls hommes qu’elle croise sont son beau-frère, le mari de sa soeur, chez qui elle habite, son petit ami qu’on ne voit pas, on l’entend seulement au téléphone. Elle rencontre aussi un homme qui lui offre un thé et qui lui montre ses objets en terre cuite. Il y aussi cet homme étrange qui la regarde quand elle sort du travail.

La vie d’Hanieh est divisée en deux : son travail, les services administratifs ou elle doit porter la tenue obligatoire et sa vie en dehors, où elle n’est plus obligée. Clairement elle n’aime pas rentrer dans le rang ni être obligée de faire ce qu’elle n’a pas envie. Pourtant son travail consiste à faire apprendre le bon comportement à avoir aux petites filles qui sont dans sa classe. On ne la voit jamais leur apprendre la géographie ou les maths, seulement énoncer des sentences sur les comportements dignes d’une femme. Là encore Hanieh est tiraillée en deux, elle se fait parfois laxiste pour laisser les petites filles s’amuser selon la manière qu’elles ont choisis.
Par exemple, dans le bus qui doivent les emmener à une cérémonie officielle, la classe d’Hanieh est caché par les quatre murs et les rideaux et elles en profitent pour mettre de la musique et danser comme elles en ont envie. Elles créent leur espace de liberté dansent, dansent autant qu’elles le peuvent.

C’est un cercle sans fin bien difficile à briser.

Mais bientôt, Hanieh verra sa mutation acceptée et sera mutée ailleurs …

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Le réalisateur ne fera pas l’affront de répondre oui lorsqu’on lui demande si son film est féministe : « C’est un film sur la violence qui afflige l’être humain, conçu comme la première partie d’une trilogie. La condition de la femme en Iran m’a paru être une des faces les plus emblématiques de cette violence qui semble parfois être intrinsèque, comme un fantôme qui poursuit chacun de nous. »

Il ne veut pas ce film comme un emblème de la situation des femmes mais un exemple d’une situation pour montrer comment peut s’incarner la violence dans la vie de tous les jours. C’est un film sur la violence mais aussi sur le cercle infini de la perpétuation de la violence étatique à travers ses sujets administratifs, sur la façon dont on peut briser la violence, que ce soit l’espace d’un instant ou plus longtemps. C’est aussi l’aspiration à la liberté que l’on voit dans la joie de vivre de ses petites filles et dans tous les moments de la vie d’Hanieh.

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